Les dispositifs de fact-checking face à l'industrialisation des fake news : la profession en ordre dispersée. L'exemple de Checknews et du Décodex

TitreLes dispositifs de fact-checking face à l'industrialisation des fake news : la profession en ordre dispersée. L'exemple de Checknews et du Décodex
Type de publicationCommunications sans actes
Année de l'intervention2017
Auteur(s)Prodhomme, M.
Résumé

Face à l’ère de la désinformation, des rumeurs, des mensonges ou de ce que certains désignent avec une pudeur feinte l’ère des faits alternatifs, la profession de journalistes s’organise en marche dispersée et riposte, sans faire corps ou communauté, par des dispositifs qui joue de la valorisation des marques médias, symbole par excellence du nouvel écosystème médiatique. Ces dispositifs, s’ils trouvent leur légitimité dans la revendication d’une pratique prudentielle,  n’objectivent pas les mêmes prétentions. Les désignations en témoignent,  Décodex (Le monde.fr) vs Désintox (Liberation.fr) tout comme les discours et les pratiques dont les deux dispositifs se réclament. Ce que l’on pourrait désigner comme une dispersion dans la riposte des médias et de la profession de journalistes au phénomène viral des fake news, rappelle l’incapacité historique de la profession à se donner des référents normatifs communs, à les revendiquer et in fine à acculturer les publics au discernement. Or discerner en démocratie, c’est possiblement contrer l’indifférence au vrai et aux faits. C’est également pallier la dissonance axiologique d’un espace public inondé de flux d’informations et créer du commun.

Cette communication se propose d’analyser et de comparer deux dispositifs de fact-checking, le Décodex et Désintox, qui consacrent autant la valorisation de la marque « médias », comme en son temps la multiplication des chartes propres aux médias, qu’une forme inédite et implicite de labellisation de l’information. Elle questionnera non pas tant l’efficacité de ces outils de régulation et de vérification des flux d’information, même si elle s’attachera à en présenter les fonctionnalités, que les discours, parfois en creux, qui les justifient et qui créent, jusque dans la profession, des dissensions. Il s’agira donc d’interroger ce que l’on pourrait appeler avec Austin, les conditions de félicité d’un journalisme de vérification, comme un nouvel agir communicationnel, dans un contexte marqué par « une rationalité algorithmisante » soulignait Edgar Morin récemment. (Morin, Le Devoir, 6 mai 2017). En effet, ces dispositifs de vérification et leur démultiplication par des acteurs de plus en plus puissants dans l’écosystème médiatique (crosscheck google, facebook) constituent les symptômes de mutations importantes qui pointent « la faillite de l’idée même du vrai et de toute prétention à établir quelque chose de commun à partir du réel » (Pingeot, The Conversation, 20 janvier 2017). Dire cela, c’est souligner le délitement d’une des fonctions sociales des médias de « créer du lien » face à une opinion devenue toute puissante. Ces dispositifs sont également caractéristiques du commerce symbolique qui sévit dans nos sociétés et d’une nouvelle forme de rationalité journalistique et d’assiègement énonciatif : comment dire le vrai, les faits dans un flux d’énonciations et une industrialisation du fake news. Il sera donc également utile de circonscrire le contexte dans lequel émergent ces outils pour mieux appréhender l’inflexion des discours qui les sous-tendent.

407

415

424

433

442

451

460

469
Notes

 

410

418

427

436

445

454

463

472
Texte complet

 

409

417

426

435

444

453

462

471