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Colloque

Droit administratif et droit naturel. Premier regard

Affiche du colloque

Droit administratif et droit naturel. Premier regard

Argumentaire

Le droit administratif est généralement considéré comme un droit assez technique se prêtant peu aux réflexions de la philosophie du droit. Trop souvent envisagé – à tort – sous l'angle exclusif du principe de légalité, ce droit semble évacuer d'emblée toute référence à des sources non-écrites, comme en témoigne le statut résiduel qu'il réserve à la coutume. Marqués par une culture française très attachée à l'écrit, les administrativistes cherchent systématiquement à fonder leur matière sur des sources textuelles : constitutionnelles, législatives, réglementaires, jurisprudentielles, etc

En réalité, le rapport de ce droit à la règle écrite demeure assez suspect pour un droit que l'on dit « fondamentalement jurisprudentiel ». Il correspond mal à la construction historique d'un droit qui a été largement réalisée en dehors de tout fondement textuel. Et il faut admettre qu'encore aujourd'hui les textes s'avèrent parfois insuffisants pour permettre au juge administratif de remplir son office. Il y a tout lieu, par conséquent, d'accorder du crédit aux réflexions de certains pères du droit administratif (Locré, Vivien, Laferrière), qui considéraient que tout ce droit était une entreprise d'équité, en l'absence de texte ou lorsque l'application d'un énoncé normatif trop général risquait d'entraîner des conséquences injustes pour l'administré.

L'ambition de ce colloque consiste à démontrer que, comme toutes les matières juridiques, le droit administratif n'échappe pas à la présence, certes discrète, du droit naturel. Encore faut-il préciser ce que l'on entend ici par « droit naturel ». Loin de réduire le droit en axiomes ou en règles, la philosophie classique du droit naturel s'appuie sur l'idée que le droit, jus, est l'objet de la justice, la mesure de ce qui est juste dans des situations concrètes. Le juste gît dans les relations interpersonnelles (le droit est un rapport à autrui) et dans les choses dues, distribuées ou échangées, afin d'attribuer à chacun sa part. Dans cette perspective, le droit administratif est aussi un art d'ajustement, de mesure et de proportion. Cette approche du droit impose une démarche inductive, plus que logico-déductive, puisqu'elle suppose moins de déployer les conséquences de principes premiers que de rechercher dans chaque situation la solution ajustée. Ainsi, l'ars juris est avant tout une méthode.

On l'aura compris, le droit naturel n'est pas entendu ici comme une suite d'axiomes non-écrits tirés de la nature humaine et opposables au despotisme de l'Etat, point de vue défendu par les doctrines modernes du droit naturel. On ne saurait non plus le réduire à des principes immuables tirés de la nature des choses, point de vue caricatural que les adversaires du droit naturel imputent aux jusnaturalistes, auxquels ils reprochent de se fonder sur un postulat « cognitiviste ». 

Peut-on envisager le droit administratif sous l'angle du droit naturel classique ? Refuser de le faire, n'est-ce pas se condamner à n'en avoir qu'une compréhension incomplète ? En effet, il existe de nombreuses figures du droit naturel classique en droit administratif. Tels sont par exemple les cas de l'engagement de la responsabilité de la puissance publique, souvent justifié sur le fondement de l'équité ; de la fixation du montant d'une indemnité, qui consiste en une véritable pesée permettant de parvenir à un juste équilibre ; de la détermination des obligations réciproques entre l'administration et son cocontractant. Cette piste peut s'avérer encore féconde pour porter un regard neuf sur des constructions que la doctrine a qualifié de « théories », mais qui relèvent plus probablement d'une attitude casuistique du juge : l'imprévision, l'enrichissement sans cause, les circonstances exceptionnelles, les compétences implicites, le fonctionnaire de fait, etc.

Il pourrait être tentant de ne voir dans ce recours au droit naturel qu'un habile maquillage destiné à cacher le pouvoir démiurgique du juge et de l'Etat. Le droit naturel ne serait que le paravent derrière lequel se dissimuleraient la domination, l'arbitraire du juge, et de façon ultime, le pouvoir et sa face hideuse de Gorgone, pour paraphraser Kelsen. Voulant rompre avec cette sombre anthropologie, cette journée tentera d'ouvrir des voies plus positives à partir de la formule de Celse, qui définissait le droit comme un « ars boni et aequi ». Et si le juge administratif, s'était parfois laissé guider, peut-être à son insu, par la volonté de rendre à chacun ce qui lui est dû ?

Le propos de ce colloque consiste à prendre au sérieux la réalité du droit administratif telle que la philosophie classique du droit permet de l'appréhender. Il n'a cependant pas pour ambition d'embrasser l'ensemble des aspects susceptibles d'être lus sous ce prisme. La question des actes administratifs, des personnes ou encore celle de la police administrative ne donneront ainsi pas lieu à des interventions spécifiques. Il portera, plus modestement, un premier regard sur la présence discrète du droit naturel classique dans la formation du droit administratif ainsi que dans certaines de ses solutions.

 

Entrée libre

Jeudi 22 Mai 2025

UCO Nantes - amphi C201
8h45

Accueil des participants

9h00

Mot de bienvenue par Clément COUSIN, directeur du campus UCO Nantes

9h05

Propos introductifs par Nicolas SILD (Université Toulouse Capitole)

Partie 1 : Le droit naturel dans la formation du droit administratif

Présidence : Édouard MARTIN (UCO Nantes)

Section 1 : Les sources

9h30

Mathilde LEMÉE (Université de Rennes) : « La continuité historique des règles du droit administratif : un indice du droit naturel ? »

10h00

David MONGOIN (Université Jean Moulin Lyon III) : « Les figures du droit naturel dans les conclusions des commissaires du Gouvernement »

10h30

Discussions et pause

Section 2 : Les méthodes

11h00

Henri BOUILLON (Université de Franche-Comté) : « Le droit administratif sans les textes »

11h30

Basile MÉRAND (UCO Nantes) : « Le droit administratif malgré les textes »

12h00

Discussions

Partie 2 : Le droit naturel dans les solutions du droit administratif

Présidence : Hélène ORIZET (UCO Angers)

Section 1 : Les biens

14h15

Nicolas HUTEN (Nantes Université) : « Le droit dans les choses : la domanialité publique naturelle »

14h45

Marjolaine MONOT-FOULETIER (Université catholique de Lyon) : « La recherche du juste dans le cadre de l’expropriation »

15h15

Discussions et pause

Section 2 : Les obligations

15h45

Alice LASSALE-JACQUEMOND (Université Jean Moulin Lyon III) : « L’équité dans les contrats et quasi-contrats administratifs »

16h15

Jean-Claude RICCI (Aix-Marseille Université) : « La réparation du dommage en droit administratif »

16h45

Discussions

17h00

Propos conclusifs par Miguel AYUSO (Université pontificale de Comillas, Espagne)

 

 

Infos pratiques
22 Mai
8h45-17h30
UCO Nantes
Comité d'organisation UCO
Comité d'organisation hors UCO
  • Nicolas Huten (Nantes Université)
  • Nicolas Sild (Université Toulouse Capitole)
Comité scientifique UCO
Comité scientifique hors UCO
  • Gilles Dumont (Nantes Université)
  • Nicolas Huten (Nantes Université)
  • Jean-Claude Ricci (Aix-Marseille Université)
  • Nicolas Sild (Université Toulouse Capitole)
Fichiers utiles
Equipe(s) UCO faculté(s)
Faculté de Droit, Économie, Gestion et Science politique
Campus
UCO Nantes