Nicolas Mathieu
Doctorant.e
Nicolas Mathieu
L’inconscient comme signifiant maitre : Psychopathologie clinique de la crise environnementale et du changement climatique
Pour Lévi-Strauss : « Quels qu’aient été le moment et les circonstances de son apparition dans l’échelle de la vie animale, le langage n’a pu naitre que tout d’un coup. Les choses n’ont pas pu se mettre à signifier progressivement ». Les animaux vivent-ils une vie sans fantasmes, une vie opératoire : une doublure vocalique sans accroches à la chaine signifiante. Une pensée opératoire, utilitariste, factuelle, tournée vers le concret, l’objet, la matière, la technique : Un mode orienté par le besoin et le signe qui n’utiliserait pas les mécanismes psychiques relevant d’un mode sexualisé. Pour Lacan, le moment où le désir s’humanise est celui où l’enfant nait au langage. Pourtant pour Derrida, définir le langage comme de telle sorte qu’il soit réservé à ce qu’on appelle l’homme est « hautement problématique ». D’autant qu’il émet l’hypothèse d’un autre langage, qui serait dégagé de ce logocentrisme qu’il dénonçait déjà dans son essai De la grammatologie.
Alors si le langage est produit par l’inconscient, cela met en tension la forclusion de l’inconscient chez l’animal. Nous pourrions alors raisonnablement écrire que toute la production épistémologique semble aliénée, sans la tentative d’une séparation, à la souveraineté du moi humain. La représentation de l’inconscient serait-elle élevée à une sorte de don réservé à l’humanité ? Du point de vue analytique, pourrions-nous écrire qu’elle serait devenue un signifiant de l’homme ? Un signifiant holophrastique gelant sa relation au reste du vivant. La question soulève l’effet d’un court-circuitage pulsionnel dont certains signifiants resteraient bloqués et ne pourraient se raccrocher à d’autres signifiants entravant l’effet d’aphanisis du sujet. En outre, que dire du double rival, cet animal forclos et miroir de l’homme ?
Dans le cadre de ces arguments, l’objectif est de comprendre comment les dispositifs cliniques seraient affectés par cette coupure entre nature et culture. Par exemple, les symptômes psychopathologiques produits par les récentes formes d’écoanxiété sont un des enjeux de cette réflexion. Avec le moi animal, il s’agirait aussi de réaborder la dynamique entre l’identification et le processus d’introjection par lequel le sujet fait passer, sur un mode fantasmatique, du dehors au dedans des objets et des qualités inhérentes à ces objets.