ECISC : Education à la Citoyenneté face aux Inégalités Sociales et Culturelles

ECISC : Education à la Citoyenneté face aux Inégalités Sociales et Culturelles

Le temps présent est caractérisé par un ensemble de difficultés qui ne font que creuser les inégalités entre les riches et les pauvres (FMI, 2015). Ces inégalités sont liées non seulement aux appartenances culturelles, religieuses, ethniques (Wallenhorst et Mutabazi, 2021), mais aussi aux caractéristiques sociales de la période contemporaine. Nous pouvons relever la question des crises sociale, économique, notamment la crise sanitaire du COVID-19 (Mutabazi, 2020), la révolution des outils numériques et technoscientifiques devenus désormais des nouveaux fétiches de la compétition économique, sociale et de l’idéologie de la communication qui favorise des formes d’inégalités sociales, d’où le terme de « fracture numérique » (Granjon, 2009), sans oublier des conditions d’habitabilité de la Terre (Steffen et al., 2004 ; Hétier, 2021 ; Wallenhorst, 2021) qui ne cesse de vulnérabiliser les plus fragiles. Et pourtant, l’un des principes chers de la citoyenneté est l’égalité entre les citoyens (Schnapper, 2000 ; Xypas, 2003) comme le porte la première phrase de l’article premier de la Déclaration universelle des droits de l'homme qui souligne que « Tous les êtres humains naissent libres et égaux en dignité et en droits. ».

Après avoir mené des recherches sur les caractéristiques de la citoyenneté contemporaine : Citoyennetés de seconde classe (Mutabazi et Wallenhorst 2021), Une citoyenneté empêchée à une éducation citoyenne (Wallenhorst et Mutabazi 2021), puis un numéro thématique d’une revue HCERES de Sciences de l’éducation (Bildungsforschung) autour de cette question (Mutabazi et Wallenhorst 2019), c’est avec le regard des sciences de l’éducation en particulier que nous voulons poursuivre notre étude avec un objectif d’inviter les chercheurs issus de différents contextes et horizons à explorer la question de l’éducation à la citoyenneté face aux inégalités sociales et culturelles. L’éducation à la citoyenneté n’est pas appréhendée dans ce projet de recherche comme la présentation de valeurs et de convictions communes à partager, mais comme la création de situations pédagogiques permettant de développer des compétences requises pour vivre ensemble (Xypas, 2003 ; Jutras, 2010) et donc d’apprendre à favoriser la participation de tous les citoyens et à lutter contre toutes formes d’injustices et d’inégalités.

En s’appuyant sur des méthodes empiriques (investigation sur le terrain) et des outils conceptuels, ce projet tentera de comprendre « comment préparer l’avenir des humains et des sociétés avec cette inégalité qui ne s’estompe pas, mais ne cesse de s’accroître surtout au cours de ces vingt dernières années (OCDE, 2015) et qui ne fait qu’exclure des personnes plus vulnérables ? » Dans cette recherche, nous interrogeons plus particulièrement la responsabilité de l’école dans la mise en œuvre de cette égalité. S’il est vrai qu’elle est le relai de l’éducation familiale et qu’elle est censée corriger ces inégalités et non les aggraver, est-elle en mesure de tenir le rôle que nous lui assignons ? Ainsi, l’école, que nous nous donnons pour assurer la réalisation d’un vivre-ensemble idéal, ne semble pas encore remplir ses fonctions. Est-elle victime d’une faiblesse structurelle, de fracture de fatigue ou d’une mission impossible ? Comment peut-elle réussir à promouvoir le lien social qui se nourrit de différences et de respect mutuel ? La justice éducative ne pourrait-elle pas corriger ces inégalités et accomplir l’éducation à la citoyenneté face aux inégalités comme la justice sociale garantit l’égalité de droit entre les peuples (Nation-Unies, 2016) ou comme la justice économique tente d’assurer l’égalité des employés au sein d’une entreprise (Hugonnier, 2017) ?

Pour répondre à ces différentes questions et penser des moyens nécessaires de correction des inégalités, nous allons réaliser dans ce projet une étude théorique sur la question de l’éducation à la citoyenneté face aux inégalités sociales et culturelles, mais aussi effectuer des enquêtes sur le terrain (dans les écoles en particulier) auprès des élèves vulnérables et leurs accompagnateurs (enseignants et éducateurs) afin de recenser des méthodes, dispositifs ainsi que des « bonnes » pratiques utilisées pour rendre justice éducative à ces jeunes vulnérables et accomplir leur éducation à la citoyenneté. Les écoles se trouvant dans les territoires qui concentrent le plus grand nombre de jeunes en difficultés, voire défavorisés (quartiers urbains de grande pauvreté, zones de revitalisation rurale (ZRR), quartier en déclin industriels ou de régions rurales isolées et marginalisées) seront privilégiés lors du choix de terrain d’enquête. Si le temps et les moyens le permettent, nous mènerons des investigations dans certaines écoles de la deuxième chance (E2C) ou les EPIDE, pour approfondir les résultats de notre étude.